Histoire générale de la commune
Carte du Pays de Gex.
Charles-Emmanuel Ier (1562-1630).
François de Sales (1567-1622).
Carte de la région Pregnote vers 1700.
Extrait du procès-verbal, du 14 février 1790, proclamant la constitution de la municipalité de Pregny.
Vue générale de Pregny-Chambésy au XIXème siècle.
Plan Wahlen à Chambésy-Dessus (photo de 1945).
Origines
Le territoire de la commune de Pregny-Chambésy, situé non loin du tracé de l’ancienne route romaine reliant Genève à Lausanne, est peut-être occupé dès l’époque néolithique. Par la suite, le lieu est habité par les Romains puis par les Burgondes.
Guerres territoriales
La première mention de Pregny date du XIIe siècle, bien que le Moyen Âge laisse plusieurs traces, telles que des voies historiques, les douves de l'île Calvin, ainsi que les vestiges des châteaux de Tournay et de Penthes.
Au Moyen Âge, Pregny dépend de la seigneurie de Tournay, elle-même sous l'autorité de la seigneurie de Gex et des comtes de Genève. Le territoire suit l’histoire du pays de Gex, qui connaît de multiples appartenances. En 1353, le comte Amédée VI de Savoie réunit Pregny à son comté de Savoie, qui deviendra, en 1416, le duché de Savoie. À l’échelle locale, Pregny est, à la fin du XIIIe siècle, le fief de la famille d’Anières (ou d'Aguières), puis, au siècle suivant, par alliance, de la famille des Genthod, qui possède le château de Tournay et l’ancienne maison forte appelée la « Tour aux moines ».
En 1536, Pregny est occupé par les troupes bernoises et genevoises, qui y introduisent la Réforme. En 1567, par le traité de Lausanne du 30 octobre 1564, les Bernois rendent le Pays de Gex, ainsi que Pregny, au duché de Savoie. Cependant, le duc Charles III de Savoie, fervent catholique et anti-protestant, accepte finalement de laisser le culte protestant dans ces villages, en réponse à la demande des pasteurs locaux.
Pregny occupe alors une position stratégique, aux portes du territoire de la République de Genève, dont la frontière est marquée par l’actuel chemin de l’Impératrice. Deux autres bâtiments fortifiés rappellent cette démarcation : le château de « Pregny-La-Tour » et la maison forte de Penthaz. Les rives de Pregny sont également connues pour leurs carrières de molasse sous-lacustre de la Petite Pierrière, exploitées depuis la fin du Moyen Âge jusqu’au XVIIIe siècle.
En 1590, la république de Genève envahit et administre le Pays de Gex, incluant ainsi Pregny. Lors de ces incursions, les troupes genevoises détruisent de nombreuses maisons fortes savoyardes, comme le château de Tournay. Huit ans plus tard, un changement politique majeur intervient en France : le 13 avril 1598, l’édit de Nantes, signé par Henri IV, étend et confirme les droits et sûretés accordés aux huguenots par des édits et traités antérieurs.
Après la guerre franco-savoyarde, plusieurs négociations politiques cruciales pour le Pays de Gex se préparent entre les cours de France et de Savoie. Genève, redoutant de perdre ce territoire qu’elle avait conquis et administré, entame des négociations avec Henri IV pour en conserver la possession. Cependant, Henri IV parvient à un accord avec le duc Charles-Emmanuel de Savoie et signe à Lyon, le 17 janvier 1601, un traité par lequel il cède toute la région située sur la rive droite du Rhône, s’étendant de Genève à Lyon, incluant la Bresse, le Bugey, le Valromey et le Pays de Gex. Dès lors, Pregny fait partie du royaume de France.
Guerre religieuse
La question religieuse dans cette région pose néanmoins de graves difficultés. Les habitants demandent à Henri IV de maintenir le protestantisme dans le Pays de Gex, ce à quoi le roi répond positivement, mais en exigeant que la « liberté de conscience » y soit respectée. Ce régime de « liberté de conscience » permet à de nombreux prêtres catholiques d’entrer sur le territoire. François de Sales, évêque de Genève, tente de déposséder les protestants de leurs biens, en particulier ceux qui, avant la Réforme, appartenaient à l’Église romaine, et de les faire attribuer au clergé catholique. Il demande ainsi la restitution des temples du bailliage. À la mort d’Henri IV en 1610, la réaction catholique devient plus forte à la cour de France et la seigneurie de Genève ne peut plus faire parvenir ses réclamations à l’autorité royale.
En 1611, l’édit de Nantes est mis en vigueur dans le Pays de Gex. Les commissaires tranchent les conflits religieux de manière équitable et rédigent une ordonnance, le 12 décembre 1611, stipulant que la dépossession des temples, cimetières et pensions ne serait exécutée que lorsque le roi aurait fourni des fonds équivalents aux biens retirés aux protestants. Toutefois, François de Sales parvient à influencer la reine régente et le Conseil, et un arrêt royal prescrit l’exécution de l’édit. Tous les bénéfices ecclésiastiques doivent être restitués au clergé romain, ainsi que les églises. Deux nouveaux commissaires, Benigne Milletot, conseiller au parlement de Dijon, et Pierre de Brosses, seigneur de Tournay, sont chargés de superviser l’exécution de l’arrêt. En juillet 1612, ils entreprennent la visite des paroisses du bailliage. Les protestants construisent de nouveaux temples pour remplacer ceux qu'ils ont dû restituer au clergé romain, réussissant à en rebâtir dans une vingtaine de villages.
Le 15 avril 1661, Louis XIV décide d’interdire le culte réformé dans tout le Pays de Gex. Par un arrêt du 23 août 1662, les temples protestants doivent être démolis, et les destructions sont supervisées par Jean d'Arenthon d'Alex, successeur de François de Sales. La chapelle de Pregny, parmi d’autres, est détruite. Entre 1684 et 1685, Jean d'Arenthon d'Alex décide de reconstruire une église catholique à Pregny. Avec la révocation de l’édit de Nantes et la promulgation de l’édit de Fontainebleau, le 18 octobre 1685, de nombreux protestants de Pregny fuient vers Genève et le Pays de Vaud. Dès lors, Pregny redevient une commune catholique.
Dès le XVIIIe siècle, le territoire de Pregny-Chambésy connaît une période de transformations architecturales marquées par l’érection et la transformation de plusieurs bâtisses élégantes dans un style classique. Parmi les exemples notables, on trouve le château de « Pregny-La-Tour », qui devient plus tard le château de l'Impératrice, le château de Penthes, anciennement la maison forte de Penthaz, ainsi que les maisons de maître comme celle de La Coudira et le château du Reposoir.
Création de la commune
Lors de la Révolution française de 1789, les habitants du pays de Gex, dont Pregny, se rallient au nouveau régime de monarchie constitutionnelle le 3 septembre 1791. Dans le cadre de cette révolution, l'Assemblée nationale constituante adopte plusieurs décrets importants : le 12 novembre 1789, la constitution des municipalités est proclamée, et le 29 décembre 1789, elle convie les assemblées des citoyens actifs pour la composition des municipalités. Le 14 février 1790, sur la demande du curé Romain Vulliet, 20 citoyens actifs se réunissent dans l'église de Pregny pour proclamer la constitution de la municipalité de Pregny. Parallèlement, l'Assemblée nationale décidait le 15 janvier 1790 de supprimer les anciennes provinces pour les remplacer par des départements, et le pays de Gex est intégré à celui de l'Ain le 4 mars 1790.
Histoire de France
Pregny subit ensuite un autre changement de régime le 21 septembre 1792, avec la proclamation de la Première République française. Par la loi du 25 août 1798, Pregny devient une commune du département du Léman. Après le coup d'État du 18 Brumaire, le 9 novembre 1799, qui instaure le régime du Consulat dirigé par Napoléon Ier, et la proclamation du Premier Empire le 18 mai 1804, Pregny, comme le reste de l'Empire, connaît un réaménagement politique.
En 1813, Genève, chef-lieu du département du Léman, retrouve son indépendance et le territoire de ce département est divisé. Pregny est réaffecté au département de l'Ain.
Menant ses campagnes d'occupation en Europe depuis 1813, Napoléon Ier perd la Campagne de France et abdique le 4 avril 1814. À partir de cette date, la France connaît la restauration de la monarchie. À Pregny, le territoire est occupé par les troupes autrichiennes depuis le 19 février 1814 et ne les quitteront que le 17 mai. Le 20 mars 1815, Napoléon Ierreprend le pouvoir et proclame l'Empire français des Cent-Jours. Il se lance alors dans la Campagne de Belgique, mais subit une défaite lors de la bataille de Waterloo. La France connaît alors une seconde Restauration de la monarchi le 8 juillet 1815.
Pregny devient suisse
Parallèlement au congrès de Vienne, qui réunit les pays vainqueurs de Napoléon Ier pour établir les conditions de la paix et redéfinir les frontières européennes, un autre événement décisif se déroule. Le congrès décide que Genève retrouvera son indépendance et verra son territoire agrandi. Ces changements s'accompagnent de négociations entre Genève et la Confédération Suisse pour un rattachement de Genève à celle-ci.
Le second traité de Paris, signé le 20 novembre 1815, acta la cession de Pregny et de cinq autres communes du pays de Gex à la Confédération Suisse. Cette décision fut mise en œuvre le 4 juillet 1816, lorsque les autorités françaises remirent officiellement ces territoires à la Suisse.
La remise officielle des communes de Pregny et des cinq autres communes gessiennes à la République et Canton de Genève a eu lieu le 10 octobre 1816 à Meyrin, en présence de Horace-Louis Micheli, commissaire fédéral, et de Charles Richard Tronchin, conseiller d’État genevois, ainsi que des maires et curés des six communes concernées.
Dès lors, plusieurs grandes familles genevoises s'installèrent à Pregny et y firent construire des châteaux et des maisons de maître. Parmi ces constructions figurent le château de Pregny, la maison de maître « Les Ormeaux », ainsi que la maison de maître « La Petite Pierrière ».
Au sein du canton de Genève, la commune de Pregny se développe progressivement au cours du XIXe siècle. En 1835, un premier bâtiment abritant à la fois l'école et la mairie est construit. Le 18 juin 1858, la première voie ferrée traversant la commune est mise en service
Le phylloxéra
En 1869, Pregny devient le lieu d'origine de la propagation du phylloxéra en Suisse. Cette année-là, Adolph Carl von Rothschild introduit des vignes anglaises dans ses serres à raisin au château de Pregny, mais celles-ci étaient déjà infectées. Entre 1871 et 1874, l'insecte se propage dans les communes de Pregny, Grand-Saconnex, Petit-Saconnex et Genthod. Les autorités ordonnent alors l'expropriation temporaire des vignes dans ces communes et leur destruction, mais la propagation de l'insecte ne peut être stoppée et atteint rapidement toute la rive droite du canton de Genève.
Face à la disparition des vignobles, les viticulteurs genevois adressent plusieurs pétitions au département fédéral de l'agriculture entre 1891 et 1893, demandant l'arrêt de la lutte contre le phylloxéra et l'autorisation de planter des vignes américaines, plus résistantes à la maladie. Le Conseil fédéral répond favorablement à cette demande et divise le canton en deux zones : dans l'une, la lutte continue, tandis que dans l'autre, la plantation de vignes américaines devient autorisée. Le 21 janvier 1898, le Conseil fédéral décide de mettre fin à la lutte et autorise la plantation de vignes américaines dans tout le canton.
L'examen des souches de vignes persiste encore quelques années dans les communes de Meyrin, Vernier, Grand-Saconnex, Petit-Saconnex et Pregny. Au total, 100 hectares de vignes sont infectés à Pregny, et 2 hectares sont perdus. La méthode de remplacement des vignes européennes par des vignes américaines se révèle être un succès, et elle est adoptée dans toute l'Europe pour lutter contre la propagation du phylloxéra.
Le Kulturkampf
Entre 1873 et 1897, Pregny est marquée par le Kulturkampf, un conflit culturel et religieux lié à l'affrontement entre l'État et l'Église catholique. Le gouvernement genevois décide de superviser le culte catholique, non pas par le pape, mais par l'État. Parallèlement, il fonde l'Église vieille catholique, une Église catholique d'État, également appelée « Église catholique nationale ». Cette loi oblige les curés catholiques romains, salariés par l'État, à prêter serment d'allégeance aux lois de la République. De plus, les églises sont déclarées propriétés communales, avec la création de conseils de paroisse. Les églises des curés qui refusent de prêter serment sont confiées à l'Église catholique nationale.
À Pregny, le Conseil municipal, en tant que propriétaire de l'église, décide que celle-ci continuera à être affectée au culte catholique romain. Cependant, le 17 août 1875, Jean Bertrand, membre du Conseil de paroisse, réclame les clefs de l'église à la mairie, mais se voit refuser l'accès. Le lendemain, le secrétaire du Département de l'Intérieur, le commissaire de police et M. Bertrand se présentent à la mairie, cette fois au nom du Conseil d'État genevois, pour obtenir les clefs de l'église. Après un nouveau refus, la police change les serrures de l'édifice. Le 24 août 1875, le maire Jean-Marie Panissod est révoqué par le Conseil d'État genevois, et l'église est attribuée à l'Église catholique nationale.
Le Conseil municipal de Pregny dépose alors un recours au Tribunal fédéral contre ce qui est perçu comme une violation de la propriété privée. En 1876, le Tribunal fédéral rejette le recours et valide la décision du Conseil d'État genevois. En signe de protestation et de fidélité à leur commune, les habitants de Pregny refusent d'utiliser l'église et continuent à célébrer l'office catholique romain dans la grange de Michel Deville, devenu maire. L'église restera fermée pendant cette période et rouvrira finalement en 1897.
Époque actuelle
Le 28 novembre 1924, la commune adopte officiellement un blason et un drapeau communal. Deux ans plus tard, en 1926, Pregny reçoit sa première installation électrique.
En 1935, les frontières communales sud-ouest entre Pregny et Genève sont modifiées à la suite d'un échange de deux propriétés entre les deux communes (la maison de maître Le Bocage et la maison de maître Le Petit-Morillon.).
Dans les années 1920 et 1930, de nombreux citadins achètent des terrains à Chambésy pour y aménager des jardins familiaux et de plaisance. Progressivement, l'exode urbain s'intensifie, et ces citadins choisissent de s'y installer de manière permanente. Ce phénomène entraîne, entre 1940 et 1960, une première vague de grandes constructions dans la commune. Les terrains agricoles et jardins familiaux sont progressivement transformés en terrains de villas. Cette augmentation démographique fait que la localité de Chambésy dépasse celle de Pregny en termes de population. Par conséquent, le maire de l'époque, Raymond Perrot, décide de changer le nom officiel de la commune. Ainsi, à partir du 1er janvier 1952, la commune est officiellement appelée Pregny-Chambésy.
En raison de la croissance de la population, l'école de Pregny devient trop petite. En 1957, une nouvelle salle communale, annexée de deux salles de classe, est construite pour accueillir les élèves. Ce nouvel établissement est connu sous le nom d'école de la Fontaine.
Le 1er novembre 1952, une première ligne d'autobus passe dans la commune.
Entre 1963 et 1964, le premier tronçon d'autoroute de Suisse, reliant Lausanne à Genève, est construit en urgence en vue de l'Exposition nationale suisse de 1964 à Lausanne. La terre excavée lors de ce chantier est déversée dans le lac, créant progressivement une nouvelle plage, l'esplanade du Vengeron. En 1969, les frontières communales Nord et Nord-Est avec Bellevue sont modifiées en raison de la construction de l'Autoroute A1. Le 27 mai 1978, un centre sportif et de loisirs est inauguré, offrant de nouvelles infrastructures aux habitants.
Grâce à sa proximité avec l'aéroport, le quartier des organisations internationales et la ville de Genève, la commune devient un lieu très prisé de la rive droite. Entre 1979 et 1982, une deuxième vague de constructions importantes transforme la commune, avec la construction d'une centaine de nouvelles villas. En 1984, une deuxième école (l'école de Valérie) est ouverte, entraînant la fermeture définitive de l'ancienne école de Pregny. En 2003, l'école de la Fontaine est démolie et remplacée par une nouvelle école plus grande.
En 1980, la frontière communale au niveau de l'esplanade du Vengeron est fixée, et la même année, une modification de la frontière avec Genève a lieu en raison du réaménagement de l'accès à l'avenue d'Appia.
Enfin, entre 1991 et 2000, la commune entre dans sa troisième vague de grandes constructions, marquée par une densification importante et des modifications des régimes de zones.
Actuellement, Pregny-Chambésy entre dans sa quatrième vague de grandes constructions. Son territoire, relativement exigu, subit une densification progressive, avec la construction d'immeubles et de logements collectifs qui se substituent peu à peu aux villas et maisons de maître. Cette évolution reflète les enjeux urbains actuels de la commune, où la pression démographique et les besoins en logements se heurtent à l’espace disponible.
Amédée VI de Savoie (1334-1383).
Henri IV (1553-1610).
Louis XIV (1638-1715).
Le château du Reposoir en 1791 (peinture de Rodolphe Gautier).
La grange du maire Michel Deville mise à disposition des catholiques romains de Pregny-Chambésy pour y célébrer leurs offices.
(Photographiée vers 1880).
Vue aérienne de la commune en 1946.
Vue aérienne de la commune en 2020.