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Château de Tournay

Route de Pregny 37 / Chemin Palud 16

1691

Localisation

Le château se situe dans la localité de Pregny, dans le sous-secteur de Pregny - village, et se dresse au sud-ouest du domaine de Tournay comprenant les lieux-dits de Chambésy-Dessus, Château de Tournay, Machéry et Monthoux. Le domaine a une surface totale de 335 156 m2, mais le terrain appartenant officiellement au château s'étend sur 331 911 m2.

Histoire

Maison forte du fief de Tournay

Après la création, aux XIIème et XIIIème siècle, de plusieurs petites seigneuries, les comtes de Genevois perdent le contrôle du territoire, car les nouveaux seigneurs ayant réussi à s'assurer une position autonome. C'est à ce moment que la seigneurie de Tournay doit son origine. Celle-ci comprenait les villages de Pregny et de Chambésy et était placée sous la suzeraineté des seigneurs de Gex.

Le fief et la maison forte de Tournay appartenaient donc, dès la fin du XIIIème siècle, aux nobles d'Aguières ou Anières.

Par le mariage d'Isabelle, fille d'Etienne d'Anières avec Aymon de Genthod, la propriété du fief de Tournay passa vers 1384 à la famille des de Genthod. Celle-ci la conserva jusqu'à son extinction en 1536. À partir de cette date, le fief passa en diverses mains et subit de nombreuses mutations et divisions. Louise, la veuve d'Amédée de Genthod (dernier descendant), avait épousé, en secondes noces, un des Crescherel. Leur fille céda ses biens à Jaques de Viry, son mari, qualifié, en 1541, du titre de signeur de Tournay. Ce de Viry vendit à son tour ses droits, en 1546, à Nicolas Le Flert et à Antoine Clavin.

Ces biens ont été ensuite vendus à Adrien de Pregrimand (ou Briquemanet), seigneur de Villemongis. La femme d'Adrien de Briquemanet les vend, vers 1558, à Noble François Moncel et ce dernier à François Lullin (1505-1572). Son fils, Antoine Lullin (1546-1603), revend à son tour, en 1573, la moitié de la maison forte à Jean de Brosses tandis que l'autre moitié dépend des fils de Pierre Lullin, ses cousins germains.

En 1583, Claude de Crose, baron de la Bastie sur Versoix, vendit à Jean de Brosses ses droits de seigneurie sur les villages de Pregny et Chambésy. Réunies à Tournay, ces terres constitueront le comté, dont les limites correspondront à ce qui devint plus trad le territoire de la commune de Pregny-Chambésy.

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La famille de Brosses, durant plusieurs générations, joua un rôle important dans le Pays de Gex et en Bourgogne. Jean de Brosses (1508-1595)le premier propriétaire du fief de Tournay, était conseiller d'État du duc de Savoie. Il abandonna la religion catholique et embrassa le calvinisme, quitta la Savoie et se retira à Genève.

En 1589, le château de Tournay avait été occupé par une compagnie savoyarde qui s'en sert de base lors d'actions militaires contre Genève. Dans les premiers mois de l'année suivante, la prise du Pays de Gex par les Genevois fut l'occasion, de leur part, de nombreuses destructions. Toutes les maisons fortes du maillage qu'ils venaient de conquérir furent brûlées. Entre 1589 et 1590, les châteaux de Divonne, de Pouilly, de Vesancy, de Vernier, de Thoiry, du Grand-Saconnex et de Tournay sont déclarés « en ruine ». Cependant, comme Jean de Brosse était « un ami de Genève », la destruction de la maison forte de Tournay par les troupes Genevoises provoqua le mécontentement et scandalisa nombre de citoyens de la ville. De son côté, Jean de Brosses, offrit de combler les fossés de Tournay et d'abattre une muraille afin que les ennemis ne puissent utiliser son château contre la République de Genève. Les Conseils de Genève décidèrent de laisser le fief de Tournay propriété de la famille de Brosses mais en promettant d'en abattre toutes les murailles et les ponts-levis, d'en combler les fossés et de la mettre hors d'état de défense, promesse que la famille exécuta.

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Son fils, Pierre de Brosses (1569-1617)formé aux affaires politiques prit une part efficace au traité de Lyon, qui donna le Pays de Gex à la France et fut récompensé par l'octroi de la charge de lieutenant civil et criminel au bailliage de Gex en 1601 et par celle de commissaire du gouvernement français pour l'exécution de l'Édit de Nantes. Le roi Henri IV donna également à Pierre de Brosses la charge de grand bailli de Gex. Il obtint aussi, pour sa terre de Tournay, le privilège des franchises et immunités.

Pierre de Brosses concéda aux habitants du village de Pregny la faculté de venir « avec la seille et la cosse » puiser de l'eau dans le bassin de la fontaine qui ornait la cour du château de Tournay, laissé en ruine. Mais il demeura interdit de recevoir l'eau du jet et d'y venir avec des bestiaux. Plus trad, Mme de Brosses, la veuve de Pierre, s'affranchit de cette servitude par la cession aux habitants de Pregny d'une source à prendre dans la vignes aux Choutagnes (Terrain de l'actuel OMS et source qui alimentait encore dans les années 1930, la fontaine publique du village).

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Son fils ainé, Charles de Brosses (1597-1674), fut nommé bailli de Gex en 1633. Il eut trois fils, Pierre (1647-1704), Claude (1650-1741) et Charles. C'est son deuxième fils, Claude, qui reprit le 14 mai 1679 le fief de Tournay, Pregny et Chambésy. En 1691, Claude de Brosses donna à H. Droz la tâche de réparer la château de Tournay. À sa mort, c'est son neveu Charles de Brosses (1709-1777) qui hérite du fief. En 1752, il reçut le titre de grand bailli de la noblesse du Pays de Gex. Bien qu'il faisait toujours de Montfalcon en Bresse son habituelle résidence campagnarde, il venait aussi quelquefois à Tournay vérifier les comptes de ses domaines. 

Château de Tournay actuel

En 1758, François-Marie Arouet, plus connu sous le surnom de Voltaire, s'établi aux Délices, en ville et République de Genève. Connu pour ses œuvres théâtrales, Voltaire attira les foudres du Consistoire de l'Église de Genève qui venait d'apprendre que celui-ci dressait un théâtre et reculait une troupe d'acteurs. Le Consistoire de l'Église s'en plaignit au Conseil qui avertit Volatire qu'il devait s'abstenir de jouer des pièces de théâtres dans sa demeure. Furieux, Volatire fit l'acquisition de terres à Ferney. Pendant que Voltaire négociait avec M. de Budé l'acquisition de son futur domaine de Ferney, il songeait à agrandir cette propriété nouvelle par l'achat du château de Tournay. Vient alors d'intenses négociations entre Voltaire et Charles de Brosses qui se terminèrent le 11 décembre 1758. Le contrat entre les deux hommes stipule que Voltaire achète le château de Tournay sous forme de bail à vie avec le titre comtal qui y est attaché au prix de 35 000 livres. Voltaire promis également de faire des réparation au château pour un prix de 12 600 livres. Voltaire s'établît au château le 24 décembre 1758 et est fêté par les habitants de Pregny.

Voltaire habita Tournay en attendant que son château de Ferney fût bâti. Il commence alors a donner des représentation théâtrale au château de Tournay dont les lieux ont spécialement été transformé à cet effet. L'embellissement du château continua avec le changement de l'escalier, le nettoyage et l'élargissement des fossés, la réparation et la transformation des ponts-levis en pont tournants. Par la suite, plusieurs frictions se déroule entre Voltaire et Charles de Brosses concernas les prix, acquisitions et utilisation du château de Tournay.

Finalement, en 1777, Charles de Brosses mourut avant Voltaire qui ne tarda pas de le rejoindre l'année suivante.

Après Voltaire, le domaine retourna à la famille de Brosses comme convenu selon le contrat d'achat. C'est le cinquième de des six enfants de Charles qui hérita du tout, René-Augustin de Brosses (1771-1834).

En République de Genève, la population y était divisée en un certain nombre de partis antagonistes dont les revendications et les luttes troublaient la paix publique. En 1781, un grand nombre de bourgeois s'étant rendu un jour, en cortège, à l'Hôtel-de-Ville pour représenter aux Conseil leurs revendications, le nom de Représentants fut donné dès lors aux partisans de cette manifestation et resta attaché au parti de la bourgeoisie. Les membres du Conseil acceuillirents fort mal la représentation des bourgeois. Ils dénièrent même complètement à ceux-ci le droit d'en faire, aussi leur donna-t-on dans le peuple le nom de Négatifs, qui resta attaché aux partisans du Conseil opposés aux Représentants. Les Représentants réclamaient la convocation régulière du Conseil général et demandaient que les citoyens fussent consultés sur toutes les affaires de qu'élues importance. Ils demandaient en outre qu'on limitât le nombre de personnes de même nom et de même famille qui pourraient faire partie des Conseils. Tenant compte de l'opinion publique, le Petit Conseil dut faire qu'élues concessions au peuple, mais, comme d'habitude, ses promesse ne furent pas toujours tenues et de nouveaux troubles ne tardèrent pas à éclater. C'est la Révolution Genevoise de 1782. Lors des émeutes d'avril 1782, Les Conseils et syndics durent démissionner et les Négatifs s'enfuirent de la ville.

Trois anciens syndics du groupe des Négatifs, Jean-Louis Micheli-du-Crest, de Chapeaurouge et Mallet s'étaient établis au château de Tournay dont le lieu était devenu le refuge du Comité des Négatifs et que l'armée française ne tarda pas à venir s'y établir également.

Voulant reprendre le pouvoir, les Négatifs invoquèrent l'aide des puissances gérantes étrangères. six mille Français, trois mille Sardes et trois mille Bernois vinrent mettre le siège devant Genève. Cette démonstration militaire excitable patriotisme des Représentants qui remit les remparts en état, barricada les rues et fortifia les maisons.

Dans la nuit du 1 au 2 juillet 1782, les troupes étrangères descendirent des hauteurs de Pregny et de Saconnex en entrèrent par les trois portes de la ville. Le gouvernement négatif fut rétabli et des poursuivent furent commencées contre les chefs du mouvement révolutionnaire.

Lors de la révolution de 1789, les habitants du pays de Gex se rallièrent au nouveau régime de monarchie constitutionnelle le 3 septembre 1791. Entre-temps, l'Assemblée nationale constituante décrète, le 12 novembre 1789, la constitution des municipalités et, le 29 décembre 1789, la convocation des assemblée des citoyens actifs pour la composition des municipalités. Le 14 février 1790, à la suite de la demande du curé Romain Vulliet, 20 citoyens actifs se sont assemblés dans l'église de Pregny et proclament ensemble la constitution de la municipalité de Pregny.

Une des premières mesure prise par le nouveau régime fut la vente des biens des émigrés. Du 20 au 23 janvier 1794, la Municipalité s'occupa de la vente des biens du fief de Tournay. Le 10 février 1794, la majeure partie de la Municipalité se rendit à Gex pour assister à la vente des bâtiments et terrains de la terre de Tournay. Le domaine fut divisé en deux : la première fut vendue pour 64 000 livres à Pierre-Jean Panissod, ancien fermier des de Brosses; la deuxième fut vendue pour 67 000 livres à m. Lavergne qui l'a vendit ensuit à M. Piron qui, à son tour, la revendit à Pierre-Jean Panissod. L'ensemble du domaine revint ainsi à la famille Panissod qui le conserva au cours du dix-neuvième siècle et en fut propriétaire pendant quatre générations.

Par le second traité de Paris du 20 novembre 1815, la commune de Pregny est cédée à la Confédération Suisse le 4 juillet 1816 et est officiellement rattachée à la République et Canton de Genève le 10 octobre 1816.

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Les membres de la famille Panissod ont joué un rôle très influente dès l'origine de la Commune de Pregny.

Jean-Pierre Panissod fut élu Procureur général de la municipalité le 14 février 1790. Il est resté en fonctions jusqu'au 17 novembre 1791. Il a été ensuite élu Adjoint du 30 mars 1798 jusqu'au 15 mai 1800. Louis Antoine Panissod, son neveu, a été élu officier d'état civil du 10 janvier 1794 au 6 novembre 1795. Isaac-Antoine Panissod, fils de Pierre-Jean, a été élu Adjoint le 10 octobre 1813 et le reste jusqu'au décret de Napoléon 1er du 15 mai 1815 destituant les municipalité élues sous Louis XVIII. Il fut réélu par décret du roi le 17 août 1815 et nommé Maire par le Conseil d'État de Genève en 1817. Isaac-Jules Panissod, fils d'Isaac-Antoine (1804-1882), fut nommé deuxième Adjoint le 14 août 1840 et Maire le 12 janvier 1846 jusqu'en 1861/1862. Il fut membre de l'Assemblée constituante de 1814 et du Grand Conseil de 1842 à 1846, puis de 1854 à 1856 et de 1858 à 1860. Jean-Marie Panissod (1837-1911), fils d'Isaac-Jules, fut secrétaire de la mairie de 1853 à 1861, Conseiller municipal dès 1862 et Maire de 1869 à 1906. Il fu révoqué en 1875 lors des persécutions religieuses du Kulturkampf mais fut réélu le 29 mai 1878 jusqu'en 1906. Il fut vice-président du Conseil général électoral le 11 novembre 1871, député au Grand Conseil en 1892 et vice-président de ce corps de 1897 à 1901. Connu de tous, il arpentait régulièrement les routes de la commune et les champs de sa vaste propriété de Tournay, dont il laissait libre accès au public. Il fut dans la Commune, le dernier qui savait le patois. Il eut trois fils : Henri, Isaac et Charles.

De 1851 à 1896, la famille Panissod laisse le château de Tournay au Comité international de secours aux blessés en cas de guerre. Le château sert alors de pension et reçoit pendant l'été des fillettes faibles, maladives ou convalescentes.

En 1915, le château de Tournay a été acheté par Alfred Baur, négociant et collectionneur d'art asiatique. Le château en très mauvais état (le domaine n'avait pas reçu de réparations depuis longtemps. La ferme des Panissod s'était transformé, petit à petit, en une sorte de maison de ferme à laquelle on avait ajouté quelques annexes comme logements ou pour y abriter du bétail. Le château, lui, est enfermé dans les arbres), il décida d'édifier, sur l'emplacement le plus propice, une nouvelle habitation : la « Villa Baur ».

La restauration du château se fit dès 1918. Le propriétaire décida de faire restaurer l'ancien château dans ses parties essentielles, c'est-à-dire le gros œuvre, maçonnerie et charpente, l'architecture extérieure ainsi que les abords. Aucun documents historique n'existaient pour indiquer la voie à suivre pour cette restauration ; le château, par lui-même, n'avait pas un style particulier, aussi les architectes ont résolus le problème en s'inspirant du caractère des anciens manoirs (Quelques communs furent détruits ; les fossés furent recréés ; l'aile orientale, fut unifiée ; deux tours furent ajoutées, l'une ronde à l'angle intérieur, l'autre carrée faisant pendant au donjon et un petit pavillon fut édifié à l'angle est de la cour). En 1951, à la mort d'Alfred Baur, le château et son domaine sont rachetés par la Fondation Baur.

Entre 1990 et 1994, le World Economique Forum avait pour projet de venir installer son siège dans le domaine du château de Tournay et d'y construire un bâtiment de 2 000 m2. À la suite de problèmes budgétaire, le WEF enterre l'idée de s'établir à Pregny-Chambésy.

En 2008, le domaine a été divisé en trois lots, le château et la villa avec leurs alentours respectifs constituant chacune un lot destiné à être vendu, le 3ème lot composé des terrains agricoles restant aux mains de la fondation créée par les Baur pour gérer le domaine.

Entre 2009 et 2011, le château est racheté par un particulier. Il est alors complètement restauré et reçoit son aspect actuel.

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